Renforcer notre attractivité pour financer la relance industrielle de la France par Charles Rodwell

Nommé parlementaire en mission par la Première ministre auprès du Gouvernement sur l’attractivité économique de la France et le financement de notre relance industrielle, Charles Rodwell, député de la 1re circonscription des Yvelines, dresse les enjeux de cette bataille et appelle les élus locaux et les entreprises de tous les départements à partager leurs propositions.

Depuis 2017, Emmanuel Macron a fait de la relance de nos industries une priorité. Malgré des difficultés persistantes, quelques premiers succès sont très encourageants. Dans une récente tribune pour Marianne, vous plaidez pour renforcer l’attractivité de la France, afin de convaincre des investisseurs venus du monde entier d’investir dans notre pays, au service de nos intérêts nationaux. Quels en sont les enjeux ?

 

La relance industrielle de la France est la mère de nos batailles. Elle l’est, parce qu’elle doit permettre à chaque Français de retrouver le pouvoir de vivre de son travail, quelle que soit la région dans laquelle il vit.

 

Après trente années de désindustrialisation qui ont fracturé notre pays, cette relance est engagée, avec des premiers succès concrets, qui reposent sur des choix politiques assumés. Grâce à notre politique fiscale, les impôts des ménages et des entreprises ont baissé de plus de 50 milliards d’euros. Grâce aux réformes de notre marché du travail, nos entreprises ont créé près de 2 millions d’emplois partout en France, en six ans. Grâce à nos investissements massifs, publics et privés, dans l’offre française, près de 200 usines ont ouvert en France sur les deux dernières années.

 

Ces succès reposent également sur l’engagement des Français qui, par leur travail, financent les 150 milliards d’euros d’investissements publics engagés à travers les plans France Relance et France 2030.

 

Enfin, ces succès reposent sur l’engagement des entreprises françaises et internationales qui font le choix d’investir en France, pour y implanter des activités stratégiques pour la sécurité de nos chaînes de valeur. Dans un monde en pleine recomposition géopolitique, leur maîtrise est devenue un enjeu capital pour garantir l’indépendance et la prospérité de notre pays.

 

Vous évoquez la sécurité de nos chaînes de valeur stratégiques. Sur cette question, comment renforcer à la fois l’attractivité et la souveraineté de notre pays, deux objectifs qui peuvent sembler contradictoires ?

 

Alors que l’édition 2023 du Sommet Choose France s’est tenu le mois dernier à Versailles, dans ma circonscription, affirmons-le clairement : la France est depuis quatre ans le pays européen le plus attractif pour les investissements étrangers, c’est une bonne nouvelle pour la maîtrise de nos chaînes de valeur stratégiques.

 

En la matière, les exemples pleuvent. La production de batteries en France et en Europe est fondamentale pour permettre à nos filières d’excellence – notamment automobile – de réussir leur transition électrique. C’est le sens de l’essor de notre champion national Verkor et de l’implantation des sites industriels d’ACC, de Prologium et de XTC dans les Hauts-de-France.

 

Notre dépendance extrême aux importations de semi-conducteurs venues d’Asie, met en doute la pérennité d’une part de nos industries aéronautiques, automobiles et informatiques au 21e siècle. C’est l’enjeu de l’investissement record annoncé conjointement en 2023 par STMicroelectronics et Global Foundries, pour l’extension du site de production de Crolles.

 

En matière de santé, c’est pour faire face aux pénuries que nous avons connues depuis l’épidémie du Covid-19, que le président de la République a annoncé, en juin dernier, la relocalisation en France de la production de 25 médicaments.

 

Des initiatives que tous saluent…

 

C’est en effet dans un esprit (presque) transpartisan, que nous avons fait le choix politique et industriel décisif de reprendre le contrôle de nos chaînes de valeur stratégiques, en soutenant nos industries nationales et attirant, sur notre sol, des entreprises venues du monde entier.

 

Les premiers succès sont là : nous parvenons désormais à convaincre les plus grands groupes industriels mondiaux, d’investir en France pour y implanter leurs activités. La France doit maintenant décliner cette politique offensive, pour attirer des entreprises plus petites – des PME et des ETI – mais tout aussi stratégiques pour la sécurité de nos chaînes de valeur.

 

Comment y parvenir concrètement ?

 

C’est l’un des objets principaux de la mission que je mène pendant six mois auprès du gouvernement, à la demande de la Première ministre : créer une procédure accélérée pour attirer et faciliter l’implantation de ces PME et ces ETI dans toutes nos régions. Ceci, en apportant une réponse plus personnalisée, rapide et adaptée à leurs attentes et à leurs besoins.

 

Disponibilité foncière, accès à l’eau et à l’énergie, formation aux bonnes compétences : élu local depuis plusieurs années, je suis convaincu que les réponses les plus audacieuses et les plus efficaces à ces besoins, viennent des chefs d’entreprise, de leurs salariés et des élus locaux de tous nos départements, qui maîtrisent parfaitement les enjeux et les atouts de leur territoire pour les valoriser auprès des investisseurs internationaux.

 

C’est dans cet esprit que, dans le cadre de mon tour de France « La France sait Faire ! » dédié à l’attractivité et au financement de notre relance industrielle, je me permets de vous lancer un appel : forts de votre expérience, n’hésitez pas à me solliciter avec vos propositions, vos avis, vos conseils et vos projets ! Je tâcherai de m’en faire le relai, au service de la mission qui m’a été confiée.

Petit déjeuner autour de Laurent Solly, Directeur général de Meta France, VP de Meta Europe du Sud

La machine dépassera-t-elle bientôt son créateur ? Cette question semblait encore il y a quelques mois n’être que théorique, de la pure science-fiction. Et puis ChatGPT a fait son entrée et le monde de l’intelligence artificielle s’est ému de son arrivée. L’émotion, encore un sentiment auquel l’humanité a su garder une certaine exclusivité...

Thème : « SOMMES-NOUS PRÊTS À ACCUEILLIR LES PROCHAINES INNOVATIONS DIGITALES ? »

Petit déjeuner autour de Emmanuel Faber, Président du Conseil international des normes extra-financières (ISSB)

Ce matin-là, les parlementaires et chefs d’entreprise ne s’étaient pas levés pour Danette. Il étaient là pour échanger avec un grand patron dont la parole se fait désormais rare : Emmanuel Faber.

Thème : « L’ENTREPRISE RESPONSABLE, EST-ELLE SEULEMENT UNE OPTION ? »

Revue GEEA : Entre ambition et sobriété : faut-il choisir?

La France dispose d’innombrables atouts naturels et humains que nous devons protéger par Catherine DUMAS

Catherine DUMAS est Sénatrice de Paris et Conseillère de Paris du 17e arrondissement.

Elle contribue à défendre la place de Paris, promouvoir l’image de la France dans le monde et valoriser notre patrimoine national. Catherine DUMAS est référente dans le domaine des métiers d’art, d’excellence et du luxe notamment depuis un rapport rendu au Premier Ministre en février 2009. Elle s’investit en faveur de la table française qui rassemble les chefs, les professionnels des métiers de bouche et les responsables politiques pour promouvoir et défendre les savoir-faire traditionnels culinaires.  

Au Sénat, elle est membre de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Elle préside le groupe d’études Métiers d’Art et le groupe d’amitié France-Corée du Sud. Elle est également vice-présidente des groupes d’amitié France-Chine, France-Maroc et France-Israël.

Elle est aussi membre du Comité interministériel du Tourisme et du Haut Conseil des musées de France.

Depuis plusieurs mois, la question de la sobriété fait débat. Qu’en pensez-vous ?        

Les crises successives que nous traversons ces dernières années, comme la pandémie de la Covid-19, ou encore la guerre en Ukraine, bouleversent nos vies quotidiennes. Elles nous poussent à réfléchir et à vivre autrement.         

Pourtant, en tant que Français, nous ne pouvons pas, nous ne devons pas réduire un projet de société, ni même le projet économique de notre pays, d’une entreprise, d’une personne, à l’ambition de faire moins, de consommer moins, d’avoir moins. Se fixer la sobriété comme ambition ultime, sans chercher à exploiter ou à renforcer nos atouts, est une ambition dangereuse qui peut avoir de lourdes conséquences pour notre avenir.  

Je suis profondément convaincue qu’il ne faut pas être dans la sobriété quand il s’agit de produire et de consommer ce qui fait rayonner notre pays à travers le monde. La France dispose d’innombrables atouts naturels et humains, notamment dans les métiers d’art, d’excellence et de la gastronomie. Pour répondre aux nombreux défis qui s’annoncent, il convient de renforcer et d’utiliser ces atouts, qui sont nos forces, plutôt que, comme proposent certains, les mettre de côté, voire même les renier. Nous devons veiller à ce que la France ne soit jamais empêchée par la pusillanimité des uns, ou l’égoïsme des autres. C’est un défi que nous devons relever tous ensemble.

En tant que Sénatrice, de quelle manière défendez-vous les atouts de la France ?

Depuis plus de vingt ans, mon engagement politique a continuellement été animé par ma volonté de défendre et promouvoir notre patrimoine national qui contribue à la richesse et à la grandeur de notre pays.  

Au Sénat, je préside depuis plusieurs années un groupe d’études sur les Métiers d’art qui a pour ambition de défendre plus de 218 « métiers de la main » . Convaincue que les métiers de bouche sont des métiers d’art à part entière, j’ai fondé en 2009 le Club de la Table Française qui réunit régulièrement des parlementaires, des professionnels, des fédérations, des associations, avec l’idée de valoriser le patrimoine culinaire français, mais aussi l’agriculture, les terroirs et les produits.

En 2009, je me suis engagée pour que l’UNESCO reconnaisse le « repas gastronomique des Français » comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Depuis plusieurs années, aux côtés des représentants de la boulangerie, je défends également la candidature des « savoir-faire artisanaux et de la culture de la baguette de pain » à l’UNESCO. Ces initiatives permettent de défendre les atouts de notre pays et mettent à l’honneur cet « art de vivre à la française » à travers le monde.

Les métiers que vous défendez sont parfois considérés comme des « métiers de l’abondance ». Pensez-vous qu’ils peuvent contribuer à répondre aux défis actuels ?    

Plus que jamais, dans un monde de plus en plus instable, ces métiers constituent notre force. Ils représentent des opportunités économiques et sociales non négligeables pour notre pays.

Depuis plus de 15 ans, je suis en contact avec ces métiers, et je constate qu’ils ont pris conscience de la nécessité d’adapter leur mode de production et de commercialisation aux enjeux et aux contraintes d’aujourd’hui.       

L’enjeu climatique est sérieusement pris en compte par ces secteurs qui se veulent être le plus respectueux de la nature. Le secteur du textile, par exemple, se tourne depuis plusieurs années vers des matières premières biologiques et respectueuses de l’environnement. Les métiers de bouche font la promotion du « bien manger », en encourageant à consommer des produits artisanaux, locaux, et de saison.     

Enfin, à l’heure où le dialogue devient de plus en plus compliqué, il nous reste notre gastronomie, notre patrimoine et notre culture qui nous aident à nous lier les uns aux autres. Donc, incontestablement, les métiers d’art que je défends avec force nous aideront à relever les défis d’aujourd’hui et de demain. 

L’innovation c’est asseoir la confiance dans le progrès par Stéphane Travert

Nos modèles agricoles sont confrontés à de nombreux défis : économiques, environnementaux et sanitaires. L’agriculture française et la souveraineté alimentaire sont au cœur de nos priorités pour la France. C’est une des clefs de notre souveraineté parce que l’alimentation est au carrefour de multiples politiques qui façonnent notre pays en matière d’aménagement du territoire, de ruralité, de transition écologique, de commerce extérieur, de relations internationales de progrès et innovation.

Les femmes et les hommes de nos filières agricoles disposent de savoirs-faires et d’une force de travail indispensables à la vie économique de la France. Ils sont les gardiens des paysages et de la biodiversité, au cœur de notre identité et au cœur de nos défis alimentaires. En première ligne durant la crise, il est primordial de mettre en œuvre les conditions d’une agriculture prospère, compétitive, durable, innovante. Il ne s’agit pas d’opposer les modèles mais de les rendre complémentaires de sorte qu’ils créent des ressources suffisantes pour développer nos économies locales et, ce faisant gagner, ensuite sur les marchés nationaux et internationaux.

Une stratégie d’innovation facteur de compétitivité

Cette décennie posera l’acte fondateur pour construire une trajectoire, une ambition politique pour tirer notre agriculture vers le haut, par l’innovation, l’investissement et la confiance. C’est aussi lui garantir les outils de résistance aux effets parfois délétères de la mondialisation.

Trois objectifs stratégiques déterminent l’avenir de notre agriculture :

1-      Soutien au revenu des agriculteurs et la transformation de l’agriculture vers l’agroécologie

2-     Assurer la sécurité alimentaire de notre territoire et de nos aliments

3-     Préparer l’avenir par l’innovation et la formation des jeunes et des adultes

Sur ce dernier point, nous devons agir pour que l’innovation soit source de progrès et nos entreprises en être les fers de lance.

Ainsi cette année le SIMA, fêtait ses 100 ans. Autour de cet évènement majeur du monde agricole, une nouvelle ambition pour mieux répondre aux attentes du monde agricole et notamment des nouvelles générations a été déployée pour une agriculture plus performante et plus durable. 

Plus de 120 startups ont participé à ce rendez-vous du machinisme agricole cette année. Une première qui ouvre des perspectives :
Une tendance sur les startups qui créent des OAD (Outils d’aide à la Décision), principalement à partir d’observations numérisées (caméras, images satellites, images de drones…), et ce dans tous les domaines.
Elevages porcins, caprins, ovins, bovins… L’objectif est de faire un diagnostic instantané de comportements anormaux, défauts de croissance… afin de ne pas perdre de temps en observation tout en y consacrant le moins de temps possible.
Des innovations dans les produits stimulants ou bio (fertilisants à base de lombrics, stimulants à base de champignons, traitement des plantes aux UV pour stimuler les défenses immunitaires, stratégies de bio-contrôle…).
Des entreprises innovantes qui accompagnent le quotidien des agriculteurs non seulement pour leur donner de l’information sourcée mais aussi pour leur garantir d’avoir une vision synthétique de leur activité sur leurs smartphones, leurs tablettes et ainsi simplifier leur process agronomiques et le suivi de leurs activités.
Des startups qui créent de nouveaux produits, robotisés ou pas, afin de diminuer la pénibilité ou le temps de travail sur des tâches. De la manutention robotisée aux robots de maraîchages en passant par le suivi de caisses par RFID pour améliorer la traçabilité des produits, presque toutes les tâches qui ne réclament pas de puissance motrice trouvent des solutions automatiques à ce jour. La limite est l’accès à la route, pas encore autorisé, normé, testé (comme dans l’automobile d’ailleurs). C’est ce point qui va limiter la diffusion de ces outils pendant encore quelques années et qui va contenir les outils agricoles robotisés dans des versions transportables. Les « gros » véhicules seront cantonnés dans les plus grandes exploitations avec un observateur de proximité pour garantir la sécurité des opérations.

 

Défendre un positionnement harmonieux entre la productivité et la durabilité est un des nouveaux défis de notre temps. Nos entreprises, l’enseignement agricole, technique et supérieur sont des leviers stratégiques d’innovation et d’investissement. La force d’un collectif pour contribuer à notre souveraineté alimentaire, Française et Européenne. L’ambition comme moteur, la sobriété nouvelle manière de penser et d’agir.

Changeons de refrain par Valérie Bazin-Malgras

Il existe en France une petite musique qui revient, de temps à autre, lorsque nous discutons, ici et là, sur l’économie à l’heure de l’écologie. Cette petite musique, venue des discours les plus radicaux de l’écologie, nous répète qu’il n’est pas possible de concilier développement économique et protection de l’environnement, que l’ambition entrepreneuriale n’est qu’un frein à la grande transformation écologiste de notre société.

C’est une musique qui a un effet : normes et règlements accrus au détriment de l’autonomie de nos entreprises, attaques sur les entrepreneurs aussi bien que sur leurs projets, découragement de certains français à vouloir se lancer dans une aventure entrepreneuriale, etc. Comme si, pour atteindre nos objectifs environnementaux, il fallait revoir tout dans notre façon de concevoir l’initiative privée.

 

Nous savons pourtant que tout cela est faux. Qu’on ne peut pas opposer l’amélioration écologique et l’activité économique. Qu’on ne peut pas se dire qu’en bloquant le droit à entreprendre, on réduira les émissions de CO2 et l’utilisation de polluants. Dire cela, c’est oublier que le droit de créer son entreprise, la liberté d’entreprendre comme dirait Raymond Aron, est une liberté fondamentale au cœur de la démocratie.

 

C’est oublier qu’avec la responsabilité sociale des entreprises, les entreprises ont un impact sociétal et, plus encore, sont des acteurs majeurs de la transformation environnementale. En effet, elles ont depuis longtemps compris que l’objectif économique n’est pas unique, qu’il existe d’autres critères d’évaluation lui permettant d’atteindre les attentes de sa clientèle, par une montée en gamme des produits disponibles et un faible bilan carbone de la production.

 

Cette vision très centrée oublie même que l’activité économique en France, très contrôlée, reste toujours moins polluante que la délocalisation de la production à l’étranger, où les normes ne prennent pas en compte ce sujet. Ainsi, l’ambition du Made In France, d’une place accrue des produits français dans le commerce international sert à la fois les enjeux d’un développement économique plus soucieux de l’environnement mais aussi à la compétitivité de nos exportations, de nos entreprises, et satisfait ainsi l’économie, l’innovation et la politique environnementale nationale.

 

C’est une confiance accrue dans les acteurs économiques. L’entrepreneuriat, dans son essence, est une ambition. Il est sain ou souhaitable qu’une entreprise fasse tout pour accéder à sa taille critique, qu’elle puisse vivre et faire vivre des femmes et des hommes, qu’elle améliore ses produits et sa façon de produire.

 

Parce que, ce qu’oublient les opposants d’une croissance verte, ça n’est que par la recherche de l’innovation, c’est-à-dire l’amélioration de l’offre de biens, que nous pourrons accéder au développement vert de notre pays. L’innovation technologique, en France, est le fait de l’activité économique qui facilite l’accès de tous les français aux nouvelles technologies.

 

La « décroissance » ne semble pas prendre en compte le besoin d’équipement des ménages, des administrations, des industries, etc. Le développement économique raisonné et l’encouragement aux initiatives individuelles sont deux outils pour atteindre les objectifs environnementaux des accords de Paris.

 

 La sobriété ne doit pas être hermétique au développement économique, tout comme l’économie ne doit plus être un champ abstrait aux causes environnementales. Entre ces deux mondes, nous devons consacrer nos efforts à joindre ces deux objectifs, la seule possibilité d’une réelle « croissance verte ».

 

Réindustrialisation et crise de l’énergie : quelle ambition pour la sobriété énergétique ? par Isabelle Valentin

Crise sanitaire de la Covid, difficultés d’approvisionnement en matières premières, vagues successives de hausse des prix, augmentation sans précédent du coût de l’énergie, coût élevé de la main d’œuvre par rapport aux autres pays européens, fiscalité lourde, Isabelle Valentin, députée de Haute-Loire et conseillère départementale, s’inquiète pour la compétitivité du tissu industriel français.

1-    Nos entreprises ne sont, encore une fois, pas épargnées par la situation actuelle. Qu’en pensez-vous ?

 

Je suis très inquiète pour l’ensemble de nos filières, tous secteurs confondus. La situation, liée à l’augmentation du prix de l’électricité et du gaz, est un nouveau coup dur pour nos industries. Pour avancer et évoluer sereinement, nos industriels ont besoin de visibilité, à moyen et long terme. Aucune crise n’est insurmontable, à condition de l’avoir anticipé. Nous étions les meilleurs, il y a vingt ans, avec une énergie décarbonée et peu chère. Nous avions tout et nous terminons avec rien ; et c’est toute la chaine industrielle qui se trouve fragilisée.

 

2-    L’industrie plastique est très pourvoyeuse d’emplois dans votre circonscription. Comment cette crise énergétique est elle vécue par les industriels altiligériens ?

 

En effet, plus de 5000 emplois dépendent de l’industrie plastique en Haute-Loire. Au plus fort de la crise Covid, le gouvernement avait classé l’industrie de l’emballage plastique comme un des domaines prioritaires d’activité. Sécurité sanitaire et alimentaire oblige ! Le défi de l’économie circulaire est pleinement intégré par nos industriels qui ont beaucoup investi dans le processus de fabrication. Sobriété, oui : recyclabilité, régénération, incorporation de recyclé, réemployabilité et vertuosité en sont les maitres mots.

La poursuite des investissements nécessaires à la réalisation de cet objectif est aujourd’hui menacée par les surcoûts de l’énergie.

 

3-    Qu’en est il pour les autres filières ?

 

Pour les travaux publics et les secteurs du bâtiment, la conséquence directe est surtout liée à la hausse du prix gazole, modérée par le bouclier tarifaire et les remises de 30 centimes que nous avons voté l’été dernier. En revanche, leur grosse inquiétude concerne le manque de visibilité du côté des collectivités territoriales. Leur budget de fonctionnement fond comme neige au soleil avec les surcoûts de l'énergie. Les projets de construction ou de rénovation sont au point mort.

 

L’industrie agroalimentaire est aussi fortement touchée par les hausses des coûts (chaine du froid, four, etc.). Ce sont de gros consommateurs qui ne pourront répercuter ces charges sur le prix de vente pour garantir leur compétitivité.

 

L'agriculture subit doublement cette crise avec des aléas climatiques (sécheresse, grêle) et le surcoût des intrants et de l'énergie. Toutes les filières sont touchées : de nombreux producteurs d'endives, de tomates arrêtent les productions à cause des surcoûts face à l'Espagne, l'Italie, la Pologne, Israël qui sont de sérieux concurrents. Les terres agricoles sont devenues très prisées par de grands groupes de la finances méthanisation, photovoltaïque, éoliennes : seraient-ils aujourd'hui l'avenir de notre agriculture ? Ambition oui, sobriété oui, mais aurait-on oublié le "bon sens paysan" ? Aurait-on oublié de tirer les leçons de la crise de la Covid ? Qu’en sera-t-il de la souveraineté alimentaire si l'on brade nos terres agricoles ? Je considère quequ’elles ont vocation à nourrir les hommes et que les agriculteurs doivent être rémunérés de façon décente pour cela. C'est un choix politique ; choix politique très affirmé en région Auvergne-Rhône-Alpes avec un budget multiplié par quatre depuis 2016.

 

4- Réindustrialisation et sobriété énergétique : est-ce compatible ?

 

Nous ne pouvons pas demander à nos entreprises d’être compétitives et EN MEME TEMPS leur fixer l’objectif de réduire de 10% leur consommation énergétique d’ici deux ans. Faire plus, avec moins… Sobriété, avez-vous dit ! Commençons par alléger nos formalités administratives, mettons en adéquation notre système normatif avec les normes européennes, faisons confiance à notre jeunesse et donnons-leur les clés d’une formation d’excellence, faisons confiance à nos entrepreneurs, à nos commerçants, nos artisans, accompagnons-les plus sur du conseil plutôt que sur du contrôle répressif. 

L’effort national sur l’énergie n’est pas une nouveauté pour nos chefs d’entreprises ; ceux qui ont pu réduire leurs dépenses énergétiques sans impact sur leurs productions, l’ont déjà fait.

 

J’ai salué et encouragé le regain d’aides au secteur industriel pendant la crise sanitaire. Malgré la volonté de préparer notre pays aux défis par un plan de relance, force est de constater que les obstacles sont encore nombreux : la dépendance aux importations est immense. Nous ne maîtrisons plus nos chaînes d’approvisionnement, ce qui est catastrophique. 

Sous la canopée, le soleil par Alain Houpert

Il se revendique élu des territoires ruraux et ancien maire d’une commune de 200 habitants. Alain Houpert, Sénateur de Côte-d’Or depuis 2008 rappelle que la transition énergétique ne pourra se faire que par une réindustrialisation massive et la défense des technologies dans un contexte géopolitique incertain. Des conditions auxquelles répondent selon lui un projet unique au monde qui trouve sa source dans les terres de Bourgogne : la canopée photovoltaïque, développée par TSE qui entend répondre aux ambitions de la France : plus 45GW d'énergie solaire  d’ici 2028, soit trois fois les installations réalisées depuis 20 ans…

ous avez choisi de parler de TSE qui innove dans le cadre de l’agrivoltaïsme. Quel en est le principe et pourquoi ?

TSE vient d’inaugurer son concept en Haute-Saône et poursuivra son expérience en Côte-d’Or. C’est une première mondiale baptisée la canopée et qui porte bien son nom puisque le principe est le suivant : un parcelle agricole est recouverte de panneaux photovoltaïques à cinq mètres de hauteur, sur une longueur de 27 mètres, le tout fixé sur des câbles. La première installation permet de produire de l’électricité pour 13 000 habitants sur une superficie de 3 hectares.

En quoi est ce que ce principe diffère de panneaux au sol ?

C’est d’abord une question de foncier. Le foncier de friche qui répond aux exigences d’installation arrive au bout. L’installation d’une canopée doit répondre à des critères précis : être proche d’une centrale de distribution électrique en Haute Tension, et se trouver dans une zone ad hoc pour l’accueillir. L’autre différence est que l’installation a un minium d’emprise au sol puisque les câbles reposent sur des poteaux, qui ne rendent pas la parcelle inutilisable, bien au contraire. C’est un contrat gagnant-gagnant entre agriculteurs et acteurs de l’énergie.

N’y a t-il pas un risque de déstabiliser l’environnement avec de telles installations ?

Au contraire. Les responsables de TSE ont mené plusieurs études sur différents paramètres : la nature des sols, leur réaction et les premiers résultats sont encourageants. Les panneaux sont amovibles et se dirigent en fonction du soleil, ce qui permet à chaque parcelle d’être à un moment de la journée ombragée et donc plus productive. Cet ombrage permet aussi de mieux réguler le stress hydrique, et on a pu voir cet été que l’eau commençait à représenter un vrai problème. TSE prévoit aussi d’installer un système d’arrosage au goutte à goutte.

Ce type de technologie est-il utile dans votre département ?

Même si elle est verdoyante, la Côte-d’Or possède des territoires appauvris. Le Nord par exemple ou le Chatillonnais sont des terres qui souffrent plus que d’autres des fortes chaleurs que nous avons eues cet été. Puis la Côte-d’Or c’est aussi le territoire des grands vignobles qui sont de plus en plus soumis aux aléas climatiques notamment à la grêle. Et le système de canopée permet de protéger environ 40% des cultures. Puis la question de la transition énergétique concerne toutes les régions, voire tous les pays.

Quels sont aujourd’hui les obstacles à la transition énergétique  ?.

La France est en retard. Et les voeux pieux du gouvernement en matière de transition doivent être suivis de véritables efforts. Le principal obstacle est je crois l’impact. Nous devons développer des technologies qui n’enlaidissent pas nos paysages naturels. C’est la condition d’une acceptation par les habitants. La Bourgogne a été un temps vendu à l’éolien, contre l’avis des habitants.

Ce qui m’a aussi été rapporté, c’est la lenteur du millefeuille administratif, le plus lent d’Europe. Prendre des précautions, c’est indispensable, mais pas entraver les projets. Il faut un guichet unique pour les acteurs de la transition écologique. Il faut aussi très vite développer la technologie des panneaux photovoltaïques aujourd’hui chinois. Economiquement ils ne représentent que 20% des investissements, 80% étant confiés aux entreprises françaises ou européennes. Le contexte géopolitique appelle à une industrialisation urgente dans ces technologies. Cette canopée est une première mondiale. Ne la laissons pas partir à l’étranger. L’Ukraine nous a montré notre dépendance. En Asie, la menace d’une invasion de Taiwan inquiète profondément les acteurs. Nous ne devons pas laisser l’avenir de notre transition énergétique entre les mains de pays dont nous ne sommes pas certains de la stabilité politique et économique qui au demeurant veulent bouleverser l’ordre mondial.

Oui aux économies d'énergie, non à la décroissance, par Annie Genevard

Depuis des années, nous subissons un discours culpabilisant et défaitiste face au réchauffement climatique. Quelles que soient les énergies alternatives développées face aux énergies fossiles, la décroissance s’imposerait à nous. Annie Genevard, députée du Doubs, membre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, s’inscrit en faux contre cette logique. La sobriété énergétique est une ambition louable. Elle aide à lutter contre le réchauffement climatique, elle profite aux entreprises qui ainsi produisent davantage avec moins d’énergie. Mais nous savons bien qu’aucune économie n’existe durablement sans croissance.  Le pays a besoin d’entreprises qui investissent et produisent, pas d’entreprises qui tournent au ralenti ou plus du tout. Seuls le progrès technologique et l’innovation permettront de résoudre cette équation entre croissance et transition énergétique. Dans cet esprit, Annie Genevard souhaite vigoureusement une relance de la filière nucléaire française malmenée ces dernières années. 

La sobriété énergétique est devenue le mantra de tous les politiques, que cela soit au niveau local, national, européen. Est-ce que cela doit être l’objectif ultime de la politique énergétique de la France ? 

 

La sobriété énergétique est positive pour plusieurs raisons. Elle permet de réduire nos émissions de CO2. Elle préserve le pouvoir d’achat des ménages et allège les charges des entreprises. Elle repousse le risque de black-out cet hiver. Pour autant, toutes ces qualités ne peuvent se substituer à l’ambition première de notre politique énergétique qui est de retrouver notre souveraineté et de garantir notre croissance.   

 

Que pensez-vous du plan de sobriété énergétique annoncée par la première Ministre ? 

 

Réduire la consommation d’énergie dans le tertiaire est indispensable. Je le réclame depuis très longtemps car ce secteur représente un gisement considérable. En effet, ces bâtiments sont occupés un tiers du temps alors qu’ils sont énergétisés 81% du temps. Chez eux, les Français n’ont pas attendu le gouvernement pour réduire leur consommation afin de réduire leur facture énergétique. Je m’interroge sur l’objectif de réduction de la consommation énergétique. Le gouvernement semble l’avoir établi à  --10% en deux ans sans justifier son choix.

 

Pensez-vous que ces objectifs ne sont pas réalistes ? 

 

En 20 ans, en France, nous avons réussi à réduire la consommation énergétique de 1% par an en moyenne, grâce notamment à l’innovation technologique. En 2020, du fait du confinement, la consommation a baissé de 10% avec une récession économique de 7%. Pour tenir l’objectif de 10% fixé par le gouvernement, des usines s’arrêteront, la production baissera, les Français se déplaceront moins. Tout cela aura un effet négatif sur la croissance. Ce n’est pas ma façon d’envisager la transition écologique. Je préfère miser davantage sur l’innovation technologique et la fixation d’objectifs en tenant compte de leur acceptabilité sociale et industrielle.  

Je m’oppose à l’anti-écologie punitive de la NUPES, je m’oppose à la déconnexion de mesures annoncées. Regardez ce qui est en train de se passer avec la voiture. Le gouvernement veut interdire la vente de tout véhicule non électrique dès 2035. Il impose des Zones à Faible Emission aux grandes métropoles avant 2025. A titre d’exemple, ces ZFE excluront, de facto, les Français qui n’ont pas les moyens d’acheter ces voitures mais qui en ont besoin pour aller travailler. Ces zones seront synonymes d’exclusion pour les classes moyennes et donc d’injustice sociale. La situation pourrait être potentiellement explosive.

 

Comment envisagez-vous transition énergétique ? 

 

Je défends une société de liberté et de responsabilité.

Le développement durable repose sur 3 piliers indissociables : la préservation de l’environnement, le progrès social et la viabilité économique. Je souhaite réconcilier la transition énergétique avec l’économie, qu’il s’agisse de la taxe carbone aux frontières de l’UE, de la réforme du marché de l’électricité et du grand plan de relance du nucléaire qui produit une énergie décarbonée.  Elle fait partie des énergies alternatives aux énergies fossiles. Elle est donc adaptée à la lutte contre le réchauffement climatique. Le nucléaire nous permet de ne pas avoir à arbitrer entre croissance et transition écologique.  

Petit déjeuner autour de Patrick Pouyanné Président-Directeur général de TotalEnergies

Dès janvier, Génération Entreprise-Entrepreneurs Associés a souhaité marquer 2023
par la continuité de ses rencontres à travers l’actualité. Ça avait d’ailleurs commencé fort, en accueillant Patrick Pouyanné, Président Directeur Général de TotalEnergies.

Thème : « POUVONS-NOUS RÉELLEMENT NOUS PASSER DU PÉTROLE ? »

Si nous voulons que tout reste pareil, il faut que tout change par Victor Habert-Dassault

Giuseppe Tomasi di Lampedusa avait tellement raison ! Si nous voulons que tout reste pareil, il faut que tout change. Nul n’oserait s’opposer au principe de la défense de l’environnement et en même temps les défis sociaux et économiques sont immenses. Concrètement, comment faire ?

Même si le dérèglement est visible à l’œil nu, les Français ne sont pas prêts à tous les sacrifices pour la planète.  La lutte anti-gaspi, oui, le recyclage oui, mais l’écologie punitive, l’écologie contraignante, l’écologie autoritaire, non.

Ils ne veulent plus payer. Les citoyens sont déjà très inquiets face à l’inflation grandissante qui plombe leur budget.

Ils ne peuvent pas non plus parquer leur voiture thermique pour une mobilité douce. Prendre le volant, surtout dans la ruralité, est une absolue nécessité s’ils veulent se rendre au travail, faire les courses, emmener les enfants à l’école et même s’accorder des loisirs...

 

Les Gouvernements successifs ont souvent mis les Français dans l’embarras y compris sur les questions durables. Faute d’anticipation, faute de visibilité, faute de bon sens, des mesurettes font surface et s’érodent.

Je pense notamment aux aides qui incitaient le changement de la chaudière à fioul pour une chaudière à bois. Bonne idée sur le papier et puis la pénurie est arrivée et le prix des pellets s’est envolé. Trois fois plus cher cette année. Aucune réponse n’a été apportée pour compenser, contrairement au fioul. La colère des ménages est légitime.

Je pense aux grands mats équipés de pâles qui leur gâchent soit la vie, soit la vue sur la campagne verdoyante.

Je pense aussi à tous ceux qui entendent à la télévision qu’on se bat pour la planète et qui doivent subir l’installation de blocs d’enfouissement de déchets sous leurs fenêtres. C’est notamment le cas des communes de Bresles et de Bailleul-sur-Thérain aux côtés desquelles je me bats pour que les poubelles de l’Ile-de-France ne soient pas stockées sur notre charmant territoire de l’Oise.

 

Au trio diabolique « inflation-récession-augmentation du prix des énergies », soyons aussi ambitieux que nos concurrents américains. « Ad astra per aspera » ! Misons sur l’innovation et l’attractivité de nos territoires pour inciter les installations d’entreprise.  Comment ? En soutenant la recherche et le développement de ceux qui créent la croissance. En ne se trompant pas d’ennemis. La communication punitive de l’écologisme ne mènera jamais à la « vertuosité » des cercles.

 

Fort heureusement, nous ne partons pas d’une feuille blanche. Nous avons des atouts incontestables. Des forces vives et des cerveaux brillants qui font avancer la science et les technologies. Hier décrié, aujourd’hui jalousé, le nucléaire est à repositionner au cœur de l’échiquier politico-industriel pour assurer les besoins. Il n’y a plus de temps à perdre. La consommation en heures creuses, les énergies vertes ne suffiront pas à compenser les besoins électriques grandissants.

Alors,si nous voulons que toutreste pareil, facilitons la vie de ceux qui participent aux changements : les entrepriseset les entrepreneurs.

Elicit Plant : un champion français de l’agroécologie en devenir, par François Bonneau

Dans le contexte d’urgence climatique et de l’impact des sécheresses sur les rendements agricoles, une entreprise de la région de François Bonneau, sénateur de Charente, l’agro-tech charentaise Elicit Plant, créée en 2017 à Moulins- sur-Tardoire, propose aux agriculteurs une technologie innovante pour leur permettre de s’adapter aux exigences du développement durable, tout en augmentant leurs rendements. Cette start-up, co- fondée par Jean-François DECHEANT (président), Olivier GOULAY (vice-président du développement international) et Aymeric MOLIN (directeur de la recherche et développement), est exemplaire puisqu’elle ambitionne de devenir le champion français de la transition écologique pour l’agriculture.

Comment l’agro-tech parvient-elle à fournir une technologie innovante aux agriculteurs charentais ?

L’agro-tech souhaite renforcer l’autonomie protéique de la France en proposant des produits aux agriculteurs qui permettent un apport exogène de phytostérols. Ces molécules lipidiques d’origine végétale renforcent la résilience des plantes au stress hydrique et limitent les pertes de rendement en cas de sécheresse. Celles-ci permettent d’optimiser la consommation d’eau, de respecter les écosystèmes et d’augmenter les rendements agricoles. Lorsque j’étais Président du conseil départemental de la Charente, j’ai observé que les agriculteurs étaient face à un dilemme de choix entre l’agriculture conventionnelle et l’agriculture biologique, dont les rendements ne permettent pas toujours de répondre aux demandes alimentaires. Cette nouvelle technologie constitue donc une troisième voie alternative.

Comment la start-up promeut-elle l’innovation dans la région charentaise ?

Dans la mesure où Elicit Plant souhaite devenir le leader français de la transition écologique dans le domaine agricole, l’entreprise, constituée de vingt-quatre salariés adopte une démarche scientifique pointue et rigoureuse qui s’appuie sur la recherche fondamentale, avec des expérimentations en laboratoire et dans les champs. L’agro-tech associe donc des chercheurs (CNRS, INRAE), des ingénieurs et des agriculteurs, avec un site en Charente pour la recherche de produits biostimulants au sein d’une ferme expérimentale. La start-up est aussi partenaire d’instituts techniques, comme Terre Inovia. Cette démarche scientifique est pluridisciplinaire, collaborative et vise surtout à proposer des solutions pensées par des agriculteurs, pour des agriculteurs.

Quels sont les résultats observés en Charente ?

L’autorisation de mise sur le marché français du produit de l’entreprise, en avril 2021, dédiés aux cultures de maïs et de soja a permis la commercialisation auprès de coopératives et de distributeurs. Ceci a permis d’améliorer des rendements des cultures de soja entre 10 et 22%. L’application du produit au sein des cultures de maïs a également favorisé un gain de rendement de 10%. Ces performances technico-économiques offrent un vrai bénéfice pour les agriculteurs, dans la mesure où ces gains de productivité signifient aussi une augmentation de revenu.

Au-delà de la Charente, cette start-up a-t-elle une envergure internationale ?

L’entreprise est principalement soutenue par des financements français. De l’ordre de 16 millions d’euros, ces investissements proviennent principalement du secteur bancaire (Crédit Agricole CPE), de fonds d’investissements (Aquiti Gestion) et des aides de la région Nouvelle-Aquitaine Bpifrance. Elicit Plant a également obtenu l’aide financière de Soffinova Partners, un fonds d’investissement européen, avec le soutien du Fonds européen pour soutenir la bioéconomie circulaire (ECBF).

Toutefois, le modèle de culture agricole d’Elicit Plant s’exporte au Brésil et en Ukraine, où des gains de rendements d’environ 20% ont été notés. Le produit sera probablement mis sur le marché états-unien à l’horizon 2024.

Quels sont les nouveaux domaines de recherche d’Elicit Plant ?

Actuellement, l’entreprise effectue des recherches scientifiques afin d’optimiser la consommation d’eau des cultures de tournesol. La réduction du stress biotique, c’est-à-dire l’action néfaste d’organismes tels que les champignons et les insectes, est également un enjeu de recherche et développement puisque ces êtres vivants constituent une source majeure de pertes pour les agriculteurs.

 

Ambition et sobriété, deux nécessités conciliables par Véronique Louwagie

Véronique Louwagie est députée de l’Orne, Vice-présidente de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale qui s’est toujours intéressée à l’environnement. Lors de son dernier mandat, elle était notamment membre de la Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique. Pour la députée, le mot sobriété s’est véritablement imposé dans le débat public ces dernières semaines en lien avec la crise énergétique et le contexte d’inflation croissante. Les collectivités locales, les entreprises ont toujours dû s’adapter et concilier à la fois la sobriété et l’ambition.

Faut-il choisir entre sobriété et ambition ?

Je citerai les propos d’Ibn Khaldun, penseur arabe du XIIIe siècle, lesquels me semblent raisonner parfaitement dans le contexte dans lequel nous sommes. « Les temps difficiles créent des hommes forts, les hommes forts créent des temps prospères, les temps prospères créent des hommes faibles, les hommes faibles créent des temps difficiles ». A vouloir trop fuir la dèche, l’Homme s’est lancé dans une course au confort dont il semble aujourd’hui devoir payer la note.

Le Président de la République a récemment parlé de fin de l’abondance, signe que nous devons nous contraindre à davantage de sobriété. Il ne faut pas pour autant tomber dans l’excès inverse… Prôner le « moins » sans autre forme de procès ne peut conduire qu’à la récession et à des crises aggravées. Il s’agit d’une impasse. Si nous ne faisons pas de la sobriété « autrement », et que nous nous contentions du « moins », avec un mode de croissance qui suppose une consommation permanente, élargie, accélérée, nous allons droit dans le mur.

La vérité se situe dans la nuance, généralement à bonne distance des deux extrêmes. Entre ambition et sobriété, mon choix est de ne pas en faire.

 

Ce dilemme s’est-il déjà présenté à vous ?

Oui. D’abord en tant que Député, j’ai régulièrement l’occasion de recevoir des particuliers, entrepreneurs voire des élus locaux… qui me font régulièrement part de difficultés et d’expériences du quotidien. Il est par exemple question de gestion budgétaire ou, s’agissant des particuliers du pouvoir d’achat. La sobriété leur est imposée.

En tant que chef d’entreprise et Maire, j’ai notamment dû faire face à des contraintes budgétaires et d’investissement.

Bien entendu, si vous multipliez par 2,3 ou 15 les charges courantes d’une entreprise à l’euro près, l’esprit le plus ingénieux ne peut qu’abdiquer à trouver des solutions…

Il faut donc un équilibre raisonnable entre une sobriété nécessaire et une préservation des conditions de l’ambition.

 

Le groupe les Républicains à l’Assemblée nationale a déposé un amendement au projet de loi de finances et à la loi de programmation des finances publiques, réclamant un plan de sobriété bureaucratique. De quoi s’agit-il ?

L’Etat est l’exemple parfait de ce débat. L’Etat prélève l’impôt, ce qui lui confère en retour plusieurs devoirs fondamentaux vis-à-vis des Français. De l’ambition de remplir ces devoirs, émanent des services publics, et donc des fonctionnaires. Malheureusement à trop vouloir se mêler du moindre rouage du pays, l’Etat s’est dispersé dans ses attributions et dans ses dépenses. Face à la situation financière alarmante du pays, à la dette et au niveau colossal des dépenses publiques, les députés les Républicains alertent régulièrement sur les enjeux et la nécessité de renouer avec un Etat efficace et dynamique, plutôt que bedonnant et impotent. Nous demandons une action urgente afin de réduire la dépense publique.

Bien entendu, cela n’est pas simple. Clairement, il ne s’agit pas de priver les Français de services publics du quotidien, ni de rogner sur le budget des missions essentielles de l’Etat. Nous pensons qu’il est possible de réduire drastiquement le train de vie de l’Etat de manière indolore pour la population et les entreprises.

L’Etat doit peser moins lourd et faire plus simple. La bureaucratie doit être mise au régime.

La sobriété est nécessaire, mais elle ne doit en rien nous faire manquer d’ambition. Il ne s’agit pas de faire moins, mais de faire avec moins et donc autrement.

 

S’il fallait résumer cet objectif en quelques mots ?

Moins de cerfa, plus de services !

 

En quelque sorte, vous demandez à l’État de s’inspirer d’une réalité dont les Français, les collectivités locales et les entreprises se sont déjà imprégnées…

Effectivement, les collectivités locales, les entreprises comme les particuliers ont cette exigence que l’État n’a pas. Ils subissent et s’adaptent à la contrainte là où l’État la manie.

Pour les collectivités comme pour les entreprises, cette sobriété imposée n’obère pas pour autant leur capacité à investir, ce qui est vital. C’est aussi une forme de chance, car en définitive une gestion à l’euro près requiert une bonne dose d’inventivité si l’ambition reste intacte.   

Je ne dis pas que l’État doit s’engager à 100% sur cette voie, car les situations ne sont pas comparables. En revanche, il paraîtrait sain que l’Etat s’inspire du fonctionnement des entreprises et des collectivités locales. Il y a un principe simple que chacun comprend, selon lequel l’on ne peut dépenser plus que ce que l’on gagne. En cela, l’Etat doit s’imposer une forme de sobriété, mais en aucun cas, il ne doit renoncer aux objectifs qu’il s’est fixés.

Pour un retour au plein emploi, la France doit changer de paradigme

Plus que jamais notre pays est en tension. Cette tension se décline sous plusieurs aspects : sécuritaire, sociale, sociétale et économique. C’est la fin de l’abondance et le retour du réel. Le rideau se lève sur un triste tableau trop longtemps masqué à coup d’argent magique et d’artifices de communication. Notre dette s’approche des 3000 milliards d’euros et représente 120% du PIB. Notre balance commerciale connaît un déficit majeur avec un record de 84,7 milliards pour l’année dernière. Les caisses sociales sont à sec et les Français connaissent une grave crise du pouvoir d’achat. L’inflation fait un retour en force, la croissance est en berne et nous plongeons dans une crise énergétique inédite.

Le déclin de notre pays s’explique aussi par la perte de sens. Pour beaucoup le travail n’a plus de sens, la valeur travail n’en est plus une et le gout de l’effort inconnu. C’est un problème d’une grande gravité qui explique bon nombre de nos maux. Notre système social a fortement dégradé le rapport au travail. Trop généreux, il n’incite plus au travail mais au contraire multiplie les dispositifs alternatifs. Si le régime de l’assurance chômage est évidement nécessaire, il connaît cependant de regrettables dérives. En effet, il crée des situations ou l’inaction peut devenir préférable au travail. Lorsque les revenus d’assistance sont proches du salaire minimum, cela peut-être alors un choix rationnel (la rationalité étant la caractéristique de l’homo economicus) de se détourner du travail. Il est nécessaire de créer une vraie différence entre les revenus du travail et ceux de l’assistance. Ayons le courage politique de le faire. La mise en place de la rupture conventionnelle présente des avantages évidents pour l’employeur et le salarié, cependant elle a renversé un paradigme fondamental : c’est désormais le salarié qui décide de se mettre au chômage. Notre système social encourage ainsi les allers-retours successifs entre le travail et le chômage. Par ce raisonnement nous ne cherchons nullement à pointer du doigt certaines personnes, le système social est le premier responsable puisque qu’il rend possible ces situations.

Autre changement important : il semble désormais que l’ensemble du marché du travail soit en tension. Nous sommes dans une situation où un chômage structurel autour de 7% semble s’être installé. C’est totalement absurde à l’heure où la Banque de France indique que plus de 300.000 emplois sont à pouvoir et que le principal problème des chefs d’entreprises est le recrutement selon le Medef. Il faut un choc de simplification, il faut dénormer un pays qui est encombré, ralenti voir paralysé par l’inflation normative. Arrêtons cette fascination si française pour la complexité ! Simplicité rime avec efficacité, il faut raisonner comme des entrepreneurs. Comment voulez-vous mener des politiques incitatives autour de la création d’entreprises et d’emplois lorsque votre code du travail dépasse les 3000 pages ? Il se limite à 60 pages en Suisse.

Nous ne travaillons pas suffisamment. L’âge de départ à la retraite en France est autour de 62 ans contre 66 ans en moyenne chez nos voisins européens. 35 ans : c’est la durée de vie active en France contre 44,9 ans en Suisse. Nous avons également une moyenne de 114 jours de grève pour 1000 salariés contre 18 en Allemagne (source : Eurostat). La négociation syndicale est en piteux état dans notre pays. Mais tout cela n’a rien d’étonnant lorsqu’on connaît le rapport au travail en France, les 35h n’y sont pas pour rien…

Cependant, si le rapport au travail contribue à la dégradation de la santé économique de notre pays, c’est également par le travail qu’une amélioration nette est envisageable. En effet, si la France augmentait son taux d’activité (actuellement autour de 66%) pour atteindre celui de nos voisins allemands (77%), le paysage économique ne serait alors plus le même. En effet, les caisses sociales seraient à l’équilibre et la question des retraites bien moins épineuse. Tout espoir n’est donc pas perdu ! Il faut redonner le gout de l’effort, la satisfaction du travail bien fait, le sens de la valeur travail. C’est une priorité absolue pour le redressement économique de la France. Alors, au travail !

Dunkerque à la pointe de la décarbonation de l'industrie par Paul Christophe

Depuis son élection en 2017, le Député du Nord Paul Christophe, est particulièrement investi sur les projets de développement économique décarbonés du territoire dunkerquois.

Alors que vient de s’ouvrir dimanche dernier la COP27, Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, le Président de la République recevra ce mardi à l’Élysée, les dirigeants des cinquante sites industriels les plus émetteurs de gaz à effet de serre en France dans l’objectif d’accélérer leur transition écologique.

Parmi les invités : trois entreprises majeures du territoire : ArcelorMittal, Aluminium Dunkerque et Versalis. L’occasion pour eux d’évoquer leurs projets de décarbonation novateurs déjà bien engagés.

Monsieur le député, pourquoi pensez-vous que l'industrie possède un rôle majeur dans la transition écologique qui est en cours ?

 

Après des années de déclin relatif durant lesquelles l’industrie a vu passer son poids dans l’économie d’un quart à un peu plus de 10 % du PIB et de l’emploi, la crise du COVID-19 a permis une mise en lumière considérable de notre industrie.

Le défi de notre siècle qui est celui de la décarbonation ne pourra se réaliser pleinement sans cet organe économique vital qu'est l'industrie.


En effet, si l'industrie ne pèse que 12% de nos emplois, elle représente à elle seule 20% des émissions de gaz à effet de serre de notre pays. Les émissions sont concentrées sur certaines filières bien identifiées comme la métallurgie, la fabrication des minéraux, le ciment ou la chimie qui représentent à elles seules les ¾ des émissions du secteur. Ainsi, la décarbonation industrielle est un enjeu incontournable, à la fois pour assurer notre propre résilience puis pour permettre la transformation de l’ensemble de notre économie, dont la modernisation du système productif constitue l'un des rouages indispensables.

Comment optimiser cette décarbonation tout en évitant une désindustrialisation et des délocalisations ?

Il est vrai que l'ampleur de la tâche couplée au contexte particulier de l'explosion des coûts de l'énergie rendent les efforts beaucoup plus difficiles à fournir pour ces professionnels. Cependant, il est primordial d'investir dès maintenant de façon considérable pour limiter ces émissions de CO2 et rendre nos entreprises plus compétitives. Dans le cas contraire, nos sites seront de toute façon condamnés à plus ou moins court terme, dépassés par une concurrence étrangère plus innovante et décarbonée. Nous devons nous inscrire dans le sens de l'histoire et du progrès, ou sinon, nous serons condamnés au déclassement et la perte de souveraineté. La stratégie doit donc d'abord et avant tout être européenne. En effet, depuis 2005, la stratégie de décarbonation du secteur industriel repose fortement sur le système européen d'échange de quotas d'émission carbone qui impose un plafond d'émissions de gaz à effet de serre aux secteurs très émetteurs de l'Union européenne.

Au-delà de ces incitations, plusieurs dispositifs de soutien financier à la décarbonation sont prévus pour le secteur industriel. Au niveau national, le renforcement des aides à la recherche et à l'innovation dans le cadre de France Relance bénéficie en partie à la décarbonation de l'industrie. Ainsi, en septembre 2020, l'ancienne Ministre chargée de l'industrie, Madame Pannier-Runacher, s'était rendue à Dunkerque pour un déplacement consacré à la décarbonation de l'industrie. L'entreprise Dillinger France, producteur de tôles fortes d'acier basé à Dunkerque, a ainsi été lauréat d'un appel à projets pour un dispositif de soutien à la décarbonation. L'investissement permettra de moderniser l'un des fours, principal consommateur d'énergie de l'usine, tout en augmentant sa performance.

Avez-vous des exemples concrets de projets fonctionnels en cours de décarbonation sur votre territoire ?

Véritable poids lourd industriel de la région, ArcelorMittal, usine sidérurgique installée à Grande-Synthe donc la capacité de production est l'une des plus importantes d'Europe occidentale, a annoncé une réduction de ses émissions de plus de 35% d'ici 2030 avec une neutralité carbone pour 2050. Une étape importante vient d'être franchie avec la construction d'un démonstrateur-pilote qui vise la capture et le stockage du CO2. Cette grande tour de 22 mètres sera capable de capter environ 4 400 tonnes de CO2 par an pour traiter les gaz des hauts-fourneaux.

Engie en partenariat avec Infinium, groupe américain fournisseur de technologie pour e-carburants ultra-bas carbone, a également dévoilé un nouvel investissement plus de 500 millions d’euros pour le projet "Reuze". Ce projet de production de carburants de synthèse à partir de CO2 émis par ArcelorMittal Dunkerque et d’hydrogène vert, aura pour objectif la décarbonation du transport maritime et aérien. La mise en service est annoncée pour 2026 avec la création d'une cinquantaine d'emplois sur le territoire, signe que l'innovation est le meilleur pourvoyeur d'emplois.

De plus, le port de Dunkerque, véritable pionnier de la décarbonation de l'industrie et du transport maritime, contribue déjà activement à l’amélioration de l’empreinte environnementale du transport maritime avec notamment la mise en place d’infrastructures d’avitaillement en GNL soute et le développement de lubrifiants marins, de biocarburants et de batteries.

Il n’y a pas de fatalité au déclassement ! Editorial de Michel Herbillon

Il y a des crises qui sont de puissants révélateurs de nos faiblesses et de nos lacunes. Bien qu’étant encore la 6ème puissance économique du monde, la France semble tomber dans un inexorable déclin faute d’avoir assumé une politique ambitieuse et courageuse. Le risque aujourd’hui est de devoir gérer la pénurie qui s’impose à nous.

Nous vivons une crise profonde qui touche bien des secteurs dans notre pays et qui frappe d’abord les Français les plus modestes. Nous assistons quotidiennement à un Etat qui s’est trop longtemps reposé sur ses acquis au point d’en devenir aujourd’hui impuissant et incapable de faire face aux défis qui s’imposent à nous.

 

Nous restons le champion d’Europe des prélèvements obligatoires alors même que dans le même temps, nos services publics craquent de partout :

- Faute d’enseignants suffisamment formés, nous embauchons à la va vite des contractuels novices pour assurer l’instruction de nos enfants.

- Notre système de santé est au bord de l’asphyxie, les déserts médicaux s’étendent et le tri des patients à l’hôpital est bien une réalité. Nombre de malades n’arrivent plus à se soigner correctement et on déplore un très grand nombre de médicaments en rupture de stock.

- Le nombre de procédures judiciaires bloquées dans les commissariats et gendarmeries ne cesse de s’accroitre.

- On découvre qu’en situation de conflit de haute intensité notre armée n’aurait pas assez de munitions pour tenir plus de quelques jours de combats.

- Dans nombre de secteurs, la pénurie de main-d’œuvre fait tourner l’activité au ralenti. On ne compte plus les trains annulés, les places en crèche fermées, les chantiers retardés… et pourtant notre pays continue d’avoir plus de 5 millions de chômeurs.

 

Et que dire de notre approvisionnement énergétique. Alors que l’hiver approche, notre pays n’a jamais été autant confronté au risque de blackout de son système électrique. Certes, le conflit en Ukraine a accentué les difficultés et fait grimper les tarifs des énergies, mais si nous nous retrouvons dans la situation actuelle de devoir imposer des mesures de sobriété et de restrictions aux Français, c’est parce que nous avons mis à mal notre production nationale d’électricité. Depuis 2012, les gouvernements successifs ont conduit une politique de démantèlement de notre parc nucléaire qui nous assurait jusqu’à présent une énergie décarbonée, compétitive et souveraine. Autant d’avantages qui ont été sabordés, nous obligeant à présent à rouvrir des centrales à charbon ou à importer de l’électricité depuis l’Allemagne. Nous en payons le prix fort aujourd’hui.

 

La sobriété, qu’elle soit pour maitriser notre consommation d’énergie ou pour éviter une surconsommation des ressources, est salutaire.  Elle nous invite aussi à repenser nos pratiques au regard du changement climatique et de la préservation de l’environnement. Mais la sobriété qui se révèle être une restriction subie pour gérer la pénurie ne peut être une politique dans la durée qui soit acceptable par nos concitoyens.

 

A l’heure où les défis à surmonter se multiplient, nous ne devons pas nous résigner au déclassement de notre pays mais au contraire retrouver l’ambition d’un avenir prospère. Il n’y a pas de fatalité. Nous pouvons de nouveau emprunter le chemin de la prospérité, si nous retrouvons l’exigence de la vérité et du courage afin de mener  les réformes nécessaires au redressement de notre pays.

 

Le Général de Gaulle disait que la France ne pouvait être la France sans la grandeur. A l’époque, il avait su donner à notre pays un cap et surtout les moyens de ses ambitions. Ne perdons jamais cet esprit d’audace qui fait que nous pouvons encore obtenir à l’avenir de grandes réussites pour la France.

Concilier ambition économique et sobriété énergétique : l’enjeu est-il à notre portée ? par Josiane Corneloup

Dans un contexte budgétaire qui limite la visibilité à long terme, et de crises à répétition qui s’inscrivent dans la métamorphose des comportements, la question de la sobriété énergétique rend encore plus aléatoire l’avenir, et particulièrement celui des entreprises françaises. A peine remises de la crise sanitaire, confrontées à diverses pénuries, à la hausse des matières premières, les voilà aujourd’hui face à la crise énergétique. Si nos acteurs économiques n’ont d’autre choix que de rester ambitieux, à nous de les accompagner au mieux pour assurer cette transition et leur compétitivité. La question n’est plus de s’interroger sur le bien-fondé de la transition énergétique, mais de savoir comment la France, responsable d’environ 1% des émissions de gaz à effet de serre générées annuellement dans le monde, peut relever le défi de la neutralité carbone en trois décennies sans remettre en cause ses modes de vie tributaires des nouvelles technologies. Une équation complexe que Josiane Corneloup, députée de Saône-et-Loire, tente de résoudre

Que penser des préconisations aux entreprises ?

L’augmentation du prix de l’énergie a de quoi nous inquiéter, et encore plus les chefs d’entreprises qui n’ont aucune visibilité sur l’avenir. Lors d’une récente rencontre avec des entrepreneurs de ma circonscription, j’ai pu constater des prévisions d’augmentation de l’électricité jusqu’à 630% à compter de janvier prochain ! Comment faire face à de telles prévisions ? Et comment entendre la demande d’efforts supplémentaires alors que beaucoup de ces mesures (chauffage, éclairage, covoiturage, télétravail…) sont en place depuis longtemps dans les entreprises ; la chasse au gaspillage est une priorité des TPE, PME, artisans et commerçants qui n’ont pas attendu les préconisations du gouvernement.

Les dispositifs déployés peuvent-ils suffire ?

Des organismes comme l’Ademe proposent des guides pour réduire sa consommation avec des petits gestes au quotidien. Des audits permettent d’évaluer précisément la consommation énergétique d’un bâtiment ou d’améliorer certains postes. Le bouclier tarifaire, l’amortisseur d’électricité, de nombreux dispositifs de soutien et d’accompagnement existent. Toutefois, il faut être réalistes : toutes les entreprises ne rentrent pas dans les critères et il ne faut pas oublier non plus que certaines productions nécessitent des machines qui ne fonctionnent aujourd’hui qu’avec de l’électricité ; alors même avec la meilleure des volontés, rien ne peut les remplacer. Il est impératif d’intensifier la recherche pour recourir à de nouvelles technologies.

Comment aller plus loin dans les actions ?

Je suis toujours surprise que les réflexions autour des économies d’énergie ne conduisent à appréhender la sobriété énergétique qu’en proposant une réduction drastique des énergies fossiles. Peu de personnes s’interrogent sur l’impact environnemental du numérique alors que sa consommation en énergie continuera d’être exponentielle. Qui sait par exemple que le visionnage de toutes les vidéos dans le monde produit autant de gaz à effet de serre qu’un pays comme l’Espagne ? Et que dire du secteur spatial, des hébergeurs et fournisseurs des big datas qui réclament de plus en plus d’électricité ? Les énergies vertes peuvent atténuer les effets du numérique mais ne sauraient suffire. Méfions-nous aussi de l’effet rebond, le « paradoxe de Jevons » qui induit qu’une économie sur la consommation d’énergie au profit d’un individu ou d’une entreprise augmente de facto son pouvoir d’achat, et in fine, aboutit à augmenter sa consommation énergétique…

Le groupe SEEB à Chauffailles, spécialiste de l’usinage de pièces à forte valeur ajoutée de moyenne à grande dimensions, en petites et moyennes séries renouvelables, avec un savoir-faire reconnu à l’international.

« Nous n’avons pas attendu les annonces du gouvernement pour agir, expose Patrick Dejean, DG du groupe SEEB à Chauffailles. L’éclairage à leds et la baisse d’un degré des thermostats sont généralisés depuis longtemps mais c’est l’épaisseur du trait. 80% de notre consommation, ce sont nos machines d’usinage dont la consommation est proportionnelle à la production. Le seul poste que nous avons pu améliorer est la technologie pour l’air comprimé, avec des compresseurs à vitesse variable. En place depuis quelques mois, ce système nous permet de consommer moins d’énergie pour une efficacité similaire, et d’économiser 20 à 30% sur la consommation d’électricité liée à la production d’air comprimé. »

 

L’entreprise Ducerf à Vendenesse-les-Charolles, expert du bois depuis 1885, engagée dans une démarche éco-responsable depuis 2002, avec la certification PEFC renouvelée en 2020.

« Le bon sens et la démarche éco-responsable s’inscrivent depuis très longtemps dans l’esprit du groupe, assure Edouard Ducerf, 5e génération de l’entreprise familiale qui reste innovante tout en respectant cette nature qui la fait vivre. Les économies d’énergie, nous avons pleinement conscience de la nécessité de faire plus que ce que nous faisions jusqu’à présent ; c’est pourquoi nous avons sollicité un audit pour évaluer, poste par poste, où nous pouvons encore nous améliorer. Et bien évidemment que nous nous adapterons comme nous l’avons toujours fait. »

Quand la cohérence politique devient une absolue nécessité par Dominique de Legge

Lancé le 6 octobre dernier par le gouvernement, le plan de sobriété énergétique vise à réduire de 10% notre consommation d’énergie d’ici 2024, et concerne l’ensemble de la société : Etat, entreprises, collectivités, citoyens. Si, dans un contexte de possibles restrictions d’approvisionnement énergétique et de changement climatique, la majorité des français adhère à la philosophie de ces préconisations, à savoir consommer moins et autrement, l’impact concret de ces mesures sur les performances de notre économie peuvent inquiéter.

Dominique de Legge, sénateur d’Ille et Vilaine et Vice-président de la commission des finances se demande si le gouvernement n’a pas commis une erreur d’appréciation, en soumettant l’ensemble des problématiques économiques et sociales de notre pays au seul prisme de la vertu écologique.

Sommes-nous vraiment condamnés à choisir entre ambition économique et sobriété écologique ?

La question suppose d’emblée une forme de démission, de résignation à une baisse de performance et de croissance. On veut nous faire croire que mesure et tempérance seraient sinon incompatibles avec le désir de réussir, du moins devraient le restreindre. Je n’y crois pas, mais tout dépend de la cohérence et de l’ampleur de cette stratégie énergétique imposée par le gouvernement.

Le changement climatique constitue-t-il un obstacle à la croissance et au développement ?

Je suis d’abord frappé par la profusion des mesures tous azimut auxquelles devront se plier nos entreprises, déjà fortement soumises à des contraintes administratives et fiscales : mise aux normes des bâtiments, diagnostics de consommation, consignes strictes pour les salariés, incitation au télétravail, déploiement du forfait « mobilités durables », etc.. Cet inventaire à la Prévert faisant l’objet de « chartes d’engagement », avec la désignation, dans chaque établissement d’un « ambassadeur ou référent de la sobriété énergétique » ! On mesure l’investissement financier et le temps nécessaire que devront déployer les chefs d’entreprise pour remplir ces nombreuses conditions. Cette profusion n’est pas un gage d’efficacité, bien au contraire, elle noie et brouille les objectifs, empêche l’émergence de priorités, donc d’ambition.

Qu’est-ce-qui plombe l’économie française ?

J’observe régulièrement ce phénomène lors des débats budgétaires : quand les chiffres explosent, que tout est prioritaire, que l’on n’a pas opéré de choix, alors tout est paralysé. Je vois dans le recours massif au 49.3 l’aveu de cette faiblesse. En matière sociale, par exemple, il n’est pas possible de laisser se creuser le déficit de la sécurité sociale, de refuser la maîtrise de la politique migratoire et de prétendre mener une politique sociale cohérente.

C’est en se donnant les moyens de ses ambitions, en ciblant des priorités que l’on pourra répondre à une légitime ambition économique.

Que pensez-vous de l’ambition d’atteindre la sobriété énergétique ?

La sobriété n’est pas une fin en soi. L’écologie consiste à équilibrer les considérations économiques, sociales et environnementales, pas à soumettre un pays aux seuls impératifs de l’environnement ! Or nous assistons actuellement à une forme de diktat vertueux qui désigne et sanctionne les « mauvais élèves », je pense particulièrement aux agriculteurs, aux PME, aux petits commerçants, qui peinent à se soumettre au rythme et à l’ampleur de mises aux normes à marche forcée.

Pour une grande loi d’accélération des énergies économiques ! par Emmanuel Maquet

Le gouvernement propose d’accélérer les nouveaux projets d’énergies renouvelables et de réacteurs nucléaires par le biais de deux projets de loi sectoriels. Mais pour Emmanuel Maquet, Député de la Somme et membre de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, l’énergie n’a pas le monopole des difficultés : il n’y a pas une usine, pas une entreprise qui ne soit soumise à des aléas extravagants et des délais punitifs. L’économie toute entière a besoin de simplification et d’accélération.

Remettez-vous en cause l’effort de simplification et d’accélération du gouvernement en matière d’énergie ?

Accélérer la construction des centrales nucléaires est évidemment bienvenu. Sur les énergies renouvelables, il faut regarder au cas par cas. Mais les promoteurs des énergies renouvelables sont loin d’être les seuls à rencontrer des difficultés. Ouvrir un restaurant, une usine ou un bureau, c’est un parcours du combattant. Et si d’aventure des travaux de construction sont nécessaires, l’aléa judiciaire s’ajoute aux aléas administratifs.

Dès lors, ces deux textes apparaissent comme un pansement sur une jambe de bois. Cela fait 180 jours que le gouvernement est en place : une grande loi de simplification de l’économie aurait pu être mise sur pieds. Pourquoi légiférer par secteurs alors que c’est toute l’économie qui est sclérosée ?

Avez-vous à l’esprit des secteurs en particulier ?

Comme je l’ai dit, c’est l’économie dans son ensemble qui a besoin d’accélération. Mais en tant que secrétaire général de l’association nationale des territoires touristiques (ANETT), je suis particulièrement attentif aux difficultés du secteur du tourisme qui représente 7 % de notre PIB et a beaucoup souffert de la crise sanitaire. Il fait aujourd’hui face à des défis considérables, au premier rang desquels le recrutement, la formation et les conditions de travail.

Le commerce aurait également mérité sa loi d’accélération : comme je l’ai dit dans mon rapport sur l’avenir des commerces de proximité, il y a un vrai problème de dévitalisation des centres-villes à cause de la dégradation du tissu commercial. Ou encore l’industrie, que l’on a chassée dans les années 1980 pour financer des choix sociaux irresponsables. Aujourd’hui, son absence fait le lit des populismes.

Quelle est la cause des blocages ?

Elles sont nombreuses. Parmi elles, un décalage entre le temps administratif, le temps judiciaire et le temps économique. Les décisions des préfets sont parfois invalidées par les tribunaux plusieurs années après leur prise d’effet et le démarrage des travaux. On s’est doucement habitués à cette lenteur qui est due au manque indigne de moyens pour nos institutions judiciaires.

Une autre source des blocages et l’accumulation et la complexification croissante des documents d’urbanisme : PLU, PLUi, SCOT, SRADDET et plus récemment les PCAET, auxquels s’ajoute la contrainte du zéro artificialisation nette des sols. Avec tous ces documents, construire devient mission impossible.

Enfin, on ne fera pas l’économie d’une refonte totale de l’appareil fiscal et social. 483 taxes, impôts, contributions et cotisations, c’est insensé.

Les Français ne sont-ils pas les premiers à s’opposer aux nouveaux projets ?

La question de l’acceptabilité est évidemment essentielle. Ce n’est pas un hasard si les éoliennes font l’objet de recours dans 70 % des cas, contre seulement 10 % pour l’énergie solaire : les Français sont excédés, à raison, par les projets qui dégradent l’environnement et leur cadre de vie.

Mais pour obtenir l’acceptabilité, encore faudrait-il respecter les décisions prises. Par exemple, le projet d’éoliennes en mer au large de Dieppe et de Mers-les-Bains a fait l’objet de deux débats publics qui ont mis en évidence l’opposition des habitants : il a néanmoins été imposé.

À l’inverse, on a validé toutes les étapes à Notre-Dame-des-Landes avant de l’annuler. Au passage, on a abîmé durablement le climat en donnant raison aux violents qui occupaient ces lieux illégalement, comme à Sivens.

Il est notable que le débat est pollué par certaines forces associatives qui se sont spécialisées dans la contestation de tout. Mues par une idéologie anticapitaliste, elles maîtrisent parfaitement les rouages des procédures et des médias pour faire dérailler le plus de projets possibles. Accélérer l’économie passera aussi par un tri dans le sérieux et la sincérité de leurs actions et des suites que l’État veut bien y donner.